Le Castelnau en grande souffrance

Qu’on se le tienne pour dit, Stéphanie Guiraud-Chaumeil et ses adjoints travaillent sans relâche sur la question du commerce dans le centre-ville!

Début juin 2016, l’équipe municipale annonce en grande pompe pas moins de 70 mesures destinées à redynamiser le commerce albigeois. Rien que ça!  Pour s’en convaincre, on peut lire notamment ceci:

La Ville d’Albi souhaite plus que jamais faire du commerce une priorité de la politique municipale. C’est dans ce cadre que des engagements sont pris pour un commerce toujours plus attractif à Albi.

Plus récemment, les mesures de la majorité municipale pour « renforcer le commerce de centre-ville » ont fait la une du dernier numéro d’AlbiMag’. Parmi les 4 maigres pages du « dossier », on peut lire ceci:

Consciente que la vitalité du commerce de centre-ville contribue à l’attractivité et au développement économique d’Albi, la ville a pris de nouvelles mesures en faveur des commerçants, mais aussi des clients.

Ce laïus ultra-libéral ne laisse rien présager de bon quant aux intérêts des habitants et des petits commerçants. Depuis la classification de la cité épiscopale au Patrimoine mondial de l’Humanité en 2010, la municipalité d’Albi est en effet obnubilée par les profits générés par le tourisme et entend tout faire pour que cela continue. On peut supposer que tout ce qui n’entrera pas dans cette logique sera relégué au second plan.

majorité municipale albi stéphanie guiraud chaumeil place lapérouse

La fine équipe, à quelques têtes près

L’équipe de Stéphanie Guiraud Chaumeil, grisée par le demi-million de visites dans les principaux lieux touristiques de la ville en 2014, s’efforce donc de présenter un centre-ville conforme aux attentes des touristes. La conséquence la plus visible de cette politique est  l’homogénéisation de l’offre commerciale du cœur de ville, avec, depuis plusieurs années une colonisation croissante de franchises, majoritaires dans certains secteurs (rue Mariès notamment).

Malgré tous ces efforts acharnés pour transformer le cœur d’Albi en un vaste musée à ciel ouvert, certains points viennent faire tâche dans le paysage aseptisé voulu par la mairie. En plein cœur du périmètre UNESCO, on trouve en effet des rues dans un état de quasi-abandon: rue Émile Grand et rue Croix Blanche notamment. Cette situation contraste avec le discours lénifiant de l’équipe municipale et de sa nouvelle déléguée en charge du commerce, Laurence Pujol, pour qui le commerce dans le centre est bien vivant.

Dans le quartier du Castelnau, les dernières semaines ont été fatales pour de nombreuses boutiques, avec la fermeture coup sur coup de Mandarine (rue du Plancat), du restaurant La Tartinette, de l’épicerie bio Bonneterre, de la pizzeria La Griotte et de la forge du Viel Alby (rue Croix Blanche)! Il faut ajouter à cette hécatombe d’autres pas de porte déjà fermés: le disquaire La chansonnette (rue Puech Berenguier), le salon de coiffure Top Afrique et le théâtre de la Croix Blanche (rue Croix Blanche), Texto (rue du Plancat)…

top afrique salon de coiffure fonds de commerce vide rue croix blanche castelnau albi

Top Afrique, ancien salon de coiffure , 2 rue Croix Blanche

Le moins que l’on puisse dire c’est que l’explosion de la fréquentation touristique de ces cinq dernières années n’a pas empêché le désastre. Comment expliquer une telle situation alors même que le Castelnau  figure en bonne place dans les circuits touristiques de la cité épiscopale?

Sil est juste de dire que ce quartier est plus ou moins enclavé, il n’en reste pas moins situé dans la zone inscrite à l’UNESCO. De plus, il est aisé de s’y rendre grâce aux rues passantes de Saint Cécile et de Verdusse.

quartier Castelnau Albi plan

En fait, la marginalisation de ce quartier tient en partie à son exclusion quasi-systématique des grandes animations organisées dans le centre. Dernier exemple en date, le Castelnau n’a pas été intégré à la  grande braderie organisée par les Vitrines d’Albi cet été.  En effet, les commerçants du quartier ont eu la désagréable surprise de voir des barrières installées au bas de la rue Saint-Clair et en haut de la rue du Plancat, les excluant de facto des festivités. Il faut dire qu’aucuns d’entres eux n’est adhérent des Vitrines d’Albi…

Pour finir, il est peut-être utile de s’interroger sur la pertinence des actions menées en centre-ville. Tout d’abord, pourquoi organiser des animations qui n’englobent pas l’intégralité des rues commerçantes du cœur de ville? Des actions cohérentes doivent avoir lieu dans et hors de la cité épiscopale, du Castelnau à la Croix Verte, en passant par le marché couvert et la rue Séré de Rivière. Ensuite, pourquoi réduire les personnes qui fréquentent le cœur de ville à de vulgaires clients? Est-il nécessaire de rappeler qu’il existe d’autre activités que le shopping? Pourquoi ne pas recentrer l’offre commerciale vers les besoins des habitants des quartiers du centre? Trop de superficiel finira pas tuer le peu de vie qui y reste. Enfin, pourquoi ne pas envisager de transformer les locaux et bâtiments en lieux associatifs? La mairie pourrait ainsi faire appliquer la loi de réquisition  pour favoriser l’appropriation du centre-ville par ses habitants et futurs résidents. Mais peut-être est-ce trop demander à une municipalité obsédée par l’appât du gain touristique…

8 réflexions sur “Le Castelnau en grande souffrance

  1. Je lis votre blog et articles depuis que je vous ai découvert sur facebook il y a quelques mois. J’ai tout d’abord apprécié la démarche rigoureuse, voire sociologique et scientifique dans les stats, questionnaire et autres. Vous avez soulevé de véritables problèmes et donné un lecture des problèmes du centre ville que les albigeois, comme moi n’arrivaient pas à identifier aussi clairement et objectivement. Ces études et articles ont impulsé une réflexion, qu’on peut discuter, des réactions, parfois exagérée , mais tout ceci à eu le mérite certain de mettre la problématique réelle et importante du centre ville, de son commerce et de son accès au centre du débat public pour faire bouger les choses.
    Mais Je découvre à regret depuis quelques billets une certaine violence, limite partisane, et un manque d’objectivité qui caractérisait vos écrits. La municipalité à certainement des tors, son action est critiquable, c’est une forte probabilité, mais laissez les invectives hasardeuses aux politiciens de tous bords qui se querellent en conseil municipal et communautaire ; ceux-ci n’ont malheureusement pour nous, toujours pas compris qu’il fallait passer à une nouvelle forme de démocratie, d’action et donc de discours politique. Ne tombez pas là dedans vous non plus… À part que vous y soyez déjà? Mais je ne le crois pas.
    Je tenais à vous le signaler, car à mon humble avis, cela discrédite votre action globale qui est tout à fait méritante.

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    • Bonsoir,
      Je suis désolé que cet article vous ai déplu.
      J’ai pourtant, comme à mon habitude, tenté de décrypter (avec mes petits moyens) une situation minimisée, pour ne pas dire niée, par la municipalité en place et par l’association d’une partie des commerçants de la ville. Je tente de faire entendre une autre voix que celle de l’émerveillement permanent. Mes « invectives » se basent sur des dires et des actions, bref, sur du concret. Si vous trouvez qu’il y a du positif dans l’action menée par SGC, cela vous regarde. Je pense le contraire et tente de l’argumenter.
      Ensuite, quant à la forme utilisée ici, elle est volontairement offensive et tranche avec le ton policé de la propagande municipale. C’est un parti pris et n’altère en rien le caractère rigoureux de ma démarche. Le but est de faire réagir et je pense qu’il est atteint, comme l’illustre votre commentaire.
      Enfin, ne vous lancez pas à votre tour dans des jugements trop hâtifs. Le jeu politique m’indiffère. Ce qui m’intéresse est de réfléchir, à mon échelle, à des solutions pour rendre le centre-ville (et d’autres quartiers de la ville) plus vivable. C’est ce dont je parle en employant le terme d' »appropriation » et en militant pour l’implantation de lieux associatifs autogérés. Néanmoins, il faut composer avec ce qui se dit et se fait à l’échelon municipal et communautaire.
      Bien cordialement.

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      • Pour 2014, les chiffres de la fréquentation des sites touristiques à Albi sont les suivants:
        – Chœur de la Cathédrale: 119 044 personnes
        – Musée Toulouse-Lautrec: 168 017
        – Musée de la Mode: 13 229
        – Musée Lapérouse: 11 862
        – Académie des Miniatures: 3 092
        – Maison du Vieil Alby: 1 627
        – Gabarres: 24 083
        – Petit train touristique: 19 800
        – Total: 360 754

        Quant au tourisme d’affaires, l’ODT évoque l’organisation de 77 événements pour un total de 9 000 visiteurs.

        En ce qui concerne le nombre personnes accueillies à l’office du tourisme, on parle de 257 255 visiteurs

        Il est vrai qu’à bien regarder la manière dont a été tournée le paragraphe mentionnant le million de visiteurs, on peut supposer que ce chiffre est obtenu en calculant les années antérieures. Pour 2014, on ne dépasse pas les 400 000 visites.

        Source: http://www.albi-tourisme.fr/fr/pro/observatoire.html

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    • Les seules sources dont nous disposons pour avoir des informations sur ces 70 mesures se trouvent dans la presse locale (La Dépêche et Le Tarn Libre) et dans AlbiMag’.
      Pour mon propos, l’important ne réside pas tant dans le fond de ces mesures (quasi-inexistant) que dans la forme (annonce triomphale).
      Peut-être qu’un jour nous en saurons plus. A suivre.

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